Entretien avec László TRÓCSÁNYI, Ambassadeur de la République de Hongrie en France :
par les membres du Club UE
le 20 janvier 2011 en Salle des Actes, 17h30 à 18h30.
Nous avons la chance, ce jour-là, dans le cadre du partenariat avec le lycée KÖLCSEY de Budapest, de rencontrer un ambassadeur, et celui du pays exerçant la Présidence tournante de l’UE depuis 20 jours !!!
Depuis l'entrée en vigueur du Traité de Lisbonne qui a institué un président de l’Union européenne – actuellement Herman Van Rompuy –, le rôle des présidences tournantes s'est théoriquement amoindri. Mais le pays qui préside le Conseil garde tout de même un pouvoir d'impulsion assez fort sur l'agenda. Alors, on a préparé nos questions, on s’est arrangé avec nos professeurs pour aménager notre emploi du temps, on était plein d’enthousiasme et …. DECEPTION !!!! L’entretien est édifiant : « langue de bois », pirouettes jouant sur les difficultés de la langue française, vague mépris affiché face à certaines questions comme si on ne savait pas de quoi on parlait..
Bref, voici un résumé (presque impossible à faire au demeurant) de notre première expérience politique avec un homme …pas libre :
Petit rappel concernant le contexte politique (source : Le Monde.fr):
Budapest fait l'objet de critiques de plus en plus vives après l'adoption d'une loi controversée sur la presse, le 21 décembre ; les publications produisant des contenus qui ne seraient pas "équilibrés politiquement" ou "entravant la dignité humaine" – la loi ne précise pas ces notions – sont promises à de lourdes amendes. L'organe chargé d'infliger ces amendes n'a rien de pluraliste : les cinq membres de ce Conseil des médias sont issus du Fidesz, le parti du premier ministre conservateur Viktor Orban. Cette autorité pourra également inspecter tous les instruments et documents de l'organe de presse incriminé, avant même d'identifier un délit. Et les journalistes pourraient être obligés de divulguer leurs sources sur des questions liées à la sécurité nationale.
Outre cette loi controversée, c'est plus globalement le virage conservateur pris par le pays qui inquiète les autres pays européens. Le parti Fidesz, au pouvoir depuis les élections législatives du mois d'avril, détient plus des deux tiers des sièges au Parlement, ce qui lui permet de modifier la Constitution à sa guise. Ainsi, en réaction à l'invalidation par la Cour constitutionnelle d'une mesure budgétaire phare du premier ministre fin octobre, les députés ont purement et simplement interdit à la Cour de se prononcer sur tous les textes concernant le budget, les taxes et les impôts, sauf si ces derniers touchent à l'exécution de traités internationaux ou aux droits fondamentaux. Petit à petit, Viktor Orban s'emploie à placer des fidèles à tous les postes clés de l'Etat : présidence de la République, présidence de la Cour des comptes, procureur général…
La vague populiste qui a porté le gouvernement Orban au pouvoir s'explique largement, selon Fabio Liberti, par la situation économique très dégradée de la Hongrie. "C'est un pays très complexe, qui a toujours été le bon élève de l'Europe et du FMI dans les années 1990, mais qui fut l'une des premières victimes de la crise financière de 2008 et obligé de demander une aide extérieure, d'où un sentiment de frustration et d'humiliation", précise le chercheur.
Club UE : Votre Excellence, l’intégration de la Roumanie et de la Bulgarie dans l’espace Schengen semble être une des priorités de la présidence hongroise. Pourquoi ? En général, pour quelles raisons la poursuite de l’élargissement semble-t-elle si importante pour votre pays et jusqu’où?
Ambassadeur de Hongrie en France: entrer dans Schengen est une obligation, c’est très important de voyager sans frontières, mais il faut que des critères techniques soient respectés pour que la Roumanie et la Bulgarie entrent dans Schengen afin de réduire les risques concernant les flux illégaux d’immigrants. La Croatie entrera, pour le reste des Balkans ce sera plus long. Il faut encourager la Serbie pour mettre fin au nationalisme serbe. La Hongrie pense en général que l’intégration et les partenariats font taire les nationalismes.
Mais pour la Turquie, ce n’est pas urgent. Mais les Hongrois ont toujours été très « amis » avec les Turcs ottomans (l’Ambassadeur évoque même l’« amitié » bien connue ( ?) entre l’Empire ottoman et l’Empire austro-hongrois = à vos cours d’Histoire !!!!!!)
Un élève hongrois : Avez-vous plus de travail depuis que vous êtes ambassadeur ???
Ambassadeur de Hongrie en France: oh oui, des réceptions, des présentations, …
M. Doguet : La Hongrie a-t-elle reconnu l’indépendance du Kosovo ?
Ambassadeur de Hongrie en France: Oui bien sûr.
Club UE : Ne redoutez-vous pas que la loi sur la presse que le parlement hongrois a votée dernièrement ternisse l’image de la présidence hongroise ? Ne pensez-vous pas qu’elle est contraire aux valeurs européennes qui affirment les libertés fondamentales comme la liberté d’expression ?
Ambassadeur de Hongrie en France: Avez-vous lu la loi ? Elle est longue, 200 ou 300 articles..
Club UE : Nous savons qu’elle affirme que les journalistes ne doivent pas porter atteinte à « l’ordre moral » ; de quoi s’agit-il ?
Ambassadeur de Hongrie en France: C’était normal d’adopter une nouvelle loi sur la presse, la dernière datait de… 1985 ( ?) Il y a eu beaucoup de discussions et de malentendus au sujet de la mention « communication et information équilibrées ». La Commission européenne prépare un avis, et la Hongrie s’y conformera. (note du Club : en effet, la Hongrie a choisi de supprimer, le 16 février 2011, des pans entiers de sa loi sur la presse, selon les recommandations de la Commission ; celle-ci reste cependant vigilante )
Club UE : L’Agenda de la présidence prévoit de promouvoir les diversités culturelles, c’est-à-dire les identités nationales et régionales, et ethniques. Quelles sont les dispositions que vous voudriez mettre en place à cet effet, et particulièrement en faveur de l’intégration des Roms ?
Ambassadeur de Hongrie en France: Il y a encore beaucoup de Hongrois hors de Hongrie aujourd’hui : deux millions en Roumanie, 200000 en Serbie.. . A l’époque du communisme, l’amitié entre les peuples était privilégiée. Il y a dix millions de Hongrois dans le pays, et cinq millions hors de Hongrie ; c’est pour cela que c’est une question sensible pour nous. En 2001, une loi pour promouvoir la langue hongroise a été promulguée dans les pays limitrophes. Toutes les personnes de langue hongroise sont hongroises pour nous (citoyenneté ethnique).
Il faut bien sûr encourager les diversités culturelles, la mobilité, etc….. C’est très bien !
Club UE : Nous voulions parler des diversités à l’intérieur de la Hongrie….
Ambassadeur de Hongrie en France: Oui, je comprends. Il ya plusieurs ethnies en Hongrie, des Slovaques, des Roms… 600000 Roms (pour dix millions en Europe). Ils connaissent des difficultés car le chômage est fort depuis la chute du communisme. Mais ils en profitent : ils reçoivent 600 euros d’allocations (note du Club : plus que le salaire moyen ???) et ce n’est pas acceptable. Ils ne veulent pas travailler dans ces conditions. Mais nous avons prévu (avec votre président notamment, qui s’est ému de la question, n’est-ce pas) un Sommet sur les Roms pendant la présidence hongroise, en mai.
Un élève hongrois : Comment fait-on pour être ambassadeur, M. l’Ambassadeur ?
Ambassadeur de Hongrie en France: je suis professeur….. (long discours peu audible).
Un élève hongrois : Quelles sont les conséquences de la présidence pour la Hongrie ?
Ambassadeur de Hongrie en France: Beaucoup de conférences ont lieu à Bruxelles, évidemment, notamment le Sommet sur le dossier énergétique. Mais celle de mai aura lieu à Budapest. Les conséquences sont faibles.
Club UE : Vous annoncez le premier sommet européen sur l’énergie, qui doit évoquer les connexions des réseaux électriques et gaziers entre les Etats membres. Votre pays veut diversifier ses sources d’énergie, amoindrir la dépendance vis-à-vis de la Russie.
Ambassadeur de Hongrie en France: Oh oui, c’est un gros travail……
Club UE : Il faut aussi boucler le budget 2011 ?
Ambassadeur de Hongrie en France: Il faut trouver des compromis….c’est tellement compliqué, vraiment.
Fin de l’entretien, devoir demain.
Merci Votre Excellence.